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Paul Kabré : L’homme à qui la photographie a ouvert les portes du monde

Paul Kabré est un photographe burkinabè de renommée internationale. Par son talent de photographe, il a hissé haut le drapeau du Burkina Faso à plusieurs reprises sur le plan international. C’est aujourd’hui un modèle de réussite dans la photographie burkinabè. L’exemple de l’homme au parcours atypique inspire plus d’un dans la jeune configuration photographique burkinabè. Portrait d’une maestria de la photographie burkinabè oubliée de la Grande Chancellerie des Ordres Burkinabè. C’est à l’occasion de la journée mondiale de la photographie célébrée le 19 août de chaque année depuis 2010 que ce portrait est réalisé.

Paul Kabré a fait de la photographie sa passion. Jovial et plein d’humour, il vit tellement bien cette passion qu’il s’est fait une renommée mondiale dans ce métier. Il est sacré 3ème meilleur photographe mondial en Croatie en 1999. Il est le photographe des architectes et ingénieurs expatriés qui ont conçu et réalisé les plans des chantiers des marchés centraux de Bobo-Dioulasso et de Ouagadougou. L’art du photographe burkinabè séduit Culture France (une institution française) qui produit un livre d’or autobiographique où sont consignés son parcours et son talent photographique. Cette oeuvre intitulée “Paul Kabré” est présente dans la bibliothèque nationale de France. Sans être invité, Paul Kabré s’invite lui-même à une exposition internationale à Bamako en 2005. Il séduit les autorités du ministère de la culture malienne. Il finit par devenir la vedette de cette foire d’exposition. Dans le livre de l’exposant qui n’a pas été invité, le commissaire de l’exposition écrit ceci pour magnifier le talent de Paul Kabré : “invité inattendu mais brillamment apprécié”.

Ainsi de Montréal (Canada) à Bruxelles (Belgique) en passant par Texas (Etats-Unis), Saint-Denis (île de la Réunion), Paris (France), Zagreb (Croatie), Berne (Suisse), Barcelone (Espagne), Bologne (Italie), Alger (Algérie), Bamako (Mali), Lomé (Togo), Paul Kabré a fait quasiment le tour du monde grâce à son talent de photographe. A toutes ces occasions, l’homme n’a manqué de s’illustrer et de contribuer à hausser le capital de sympathie et d’estime du Burkina Faso à l’international. Avec ses œuvres photographiques, il réalise des cartes postales qui ont bien marché autour des années 1990. Et pourtant Paul Kabré n’a jamais reçu de distinctions nationales. Ça pourrait prêter à croire qu’ “on n’est jamais prophète chez soi”. Mais le photographe de rang mondial ne s’en plaint pas.

Grièvement blessé par un éléphant en mai 2000, il photographie ses tripes pour immortaliser ses derniers instants

L’amour de Paul Kabré pour la photographie dépasse les limites de l’entendement humain. Alors qu’il visitait le parc de Nazinga (Pô) un mardi du mois de mai 2000, il tombe nez à nez avec des éléphants. Il décide de faire quelques clichés. Un des éléphants charge contre lui. L’animal déchire son ventre et lui fait une grosse ouverture dans les côtes sur le flanc gauche. Baignant dans son sang en attente de secours, il photographie ses tripes pour selon lui immortaliser ses derniers instants. Plus de 24 ans après, il se remémore de cet épisode de sa carrière comme si c’était hier. L’homme tourne parfois en autodérision l’évènement qui a failli mettre fin à sa vie.

L’album ensanglanté de son sang par blessure d’éléphant

Même face à la mort, Paul Kabré n’a pas manqué de remuer sa passion. “J’ai photographié mes blessures avant l’arrivée des secours. Pendant mon évacuation vers l’hôpital, je leur ai d’abord communiqué les contacts de mes proches que j’avais en tête. Pour moi, c’était fini. Je leur ai dit qu’au cas où je mourrais, mon souhait était qu’on remette mes dernières photos sur mes blessures au ministère de la culture pour être exposées au musée national pour expliquer la mort d’un photographe en pleine activité. Pour moi c’était une belle manière de mourir car trouver la mort au bout de sa passion est une bonne manière de mourir”, Paul Kabré décrit-il comment il a vécu les premiers instants de l’attaque de l’éléphant.

Après d’intenses soins à Ouagadougou, l’amoureux de la photographie sort sur pieds de l’hôpital après le 15ème jour de son agression par l’éléphant. Quelques jours après, il s’envole pour Paris dans le cadre de ses activités photographiques. Il est surnommé par certains de ses amis “le miraculeux du parc de Nazinga”. Il est retourné où il a été blessé par l’éléphant en 2023 pour faire des photos d’éléphants. “En 2023, j’y suis reparti et j’ai fait les photos des éléphants. C’était pour moi une sorte de revanche après l’épisode de mai 2000, Paul Kabré lève-t-il un coin de voile sur sa témérité quand il s’agit de vivre sa passion qui est la photographie.

Paul Kabré, c’est plus de 50 ans de carrière dans la photographie

Natif de Koudougou, Paul Kabré fait ses premiers pas dans la photographie en 1973. Né en 1955, le moaga du centre-ouest n’a pas la chance d’aller plus loin que le cours élémentaire dans ses études. Né d’un père commerçant, il va vite se frayer son propre chemin de vie. La photographie est le domaine qui le séduit après qu’un expatrié lui ait une fois fait une photo alors qu’il rentrait de l’école. Il obtient plus tard son Certificat d’Études Primaires à 23 ans.

De Koudougou, le jeune homme d’alors atterri à Bobo-Dioulasso où il exerce quelques petits métiers avant de prendre la route de la Côte d’Ivoire. A Bouaké, il côtoie la vie de la rue et évolue dans le domaine de l’animation des soirées dansantes avant d’être recruté dans le domaine de l’hôtellerie en 1973 par une chaine d’hôtel qui deviendra plus tard RAN-Hôtel. Avec ses économies, il s’achète un appareil photo et se lance parallèlement dans la photographie la même année. Autodidacte dans l’âme, Paul Kabré apprends le métier de photographe sur le tas. Après son travail à l’hôtel, il se consacre à la photographie. “Quand je descendais de mon travail de l’hôtel, je me consacrais à la photographie. Je n’aimais pas quand un client arrivait au moment où je devrais descendre car ça me mettait un peu en retard sur mes activités de photographie. Tellement j’aimais la photographie plus que mon travail à l’hôtel que j’oubliais souvent que c’est grâce à ce travail que j’avais un salaire”, Paul Kabré explique son début de carrière de photographe.

La collection de Paul Kabré

En 1980, il est affecté à Ouagadougou dans le service roulant de RAN-Hotel c’est-à-dire dans le service des Wagons-lits dans le transport par train. Paul Kabré continue ses activités de photographe et met en place ‘’Chouette Photo’’, un petit studio de photos. Il gagne du succès dans cette activité secondaire. Il est affecté à RAN-Hôtel de Bobo-Dioulasso en 1988. Il met en place ‘’Chouette Photo Bobo’’. Il couvre toute sorte d’évènements et fait de ses œuvres photographiques une marque déposée. Certaines de ses photos sont utilisées pour réaliser des cartes postales au début des années 1990. Sa passion s’aiguise davantage. A la faveur de la mise en œuvre du Programme d’Ajustement Structurel (PAS) avec son chapelet de privatisations et de compressions de personnel, Paul Kabré saisit l’occasion pour mettre fin à son travail d’hôtellerie en 1997 pour se consacrer à la photographie. C’est à partir de cette époque qu’il va de gloire en gloire et monte au sommet de son art avec le titre de 3ème meilleur photographe mondial en 1999. Depuis lors, Paul Kabré commence à faire le tour du monde pour ses activités de photographe. Parallèlement, le photographe réalise des films documentaires sur les malades mentaux et aussi sur les femmes balayeuses des rues de Ouagadougou.

Aujourd’hui âgé de 69 ans, père de quatre (04) enfants et de quatre (04) petits enfants, Paul Kabré ne voit guère sa passion pour la photographie s’émousser. Il exécute toujours des marchés publics, privés et informels dans le domaine de la photographie. Il a réalisé en 2023 un photobook sur le patrimoine culturel et touristique de la région des Hauts-Bassins sur demande du Conseil Régional. Une œuvre de belle facture. Avec de telles œuvres, Paul Kabré n’entend pas prendre de retraite du domaine. “Tant que j’aurais la vue, je continuerai de faire des photos”, le photographe de renom répond-t-il à la question de savoir à quand sa retraite de la photographie.

Conscient que le métier évolue, l’homme à l’humour plaisant, continue de se former dans la photographie tout en partageant sa longue expérience avec les jeunes amoureux de la photographie.

Les prix reçus par Paul Kabré à l’international

“Paul Kabré et la photo, c’est comme une personne et son ombre”

François Yaméogo est le neveu de Paul Kabré. Lui aussi photographe, il a fait ses premiers pas dans la photographie grâce à son oncle. Il reconnait en lui, un amoureux du travail bien fait. Il aime aussi, témoigne-t-il, prendre d’énormes risques pour pouvoir faire des prises de vue. “Paul Kabré aime le travail bien fait. Quand il exécute un marché, son premier but de satisfaire son client par la qualité de son travail. Au moment où on utilisait encore les pellicules, mon oncle pouvait utiliser trois (03) à quatre (04) pellicules pour une même photo. Tout cela dans le but de satisfaire ses clients. Il prend souvent des risques pour avoir de belles images. Il fut un temps où les compagnies de transport demandait des photos de leurs cars en pleine circulation. Paul Kabré était capable de laisser les guidons de sa moto à vive allure pour pouvoir faire de belles images. C’est un homme qui aime ce qu’il fait. Et vu qu’il aime son métier, il le fait très bien”, François Yaméogo admire-t-il les qualités professionnelles de son oncle qui l’a bien formé à la photographie.

Fille de Paul Kabré, Suzanne Yaméogo trouve que la photographie dépasse les limites d’une profession chez son père. “La photographie est devenue pour notre père une compagne. Il photographie tout ce qui l’épate sur son chemin. Je peux dire que la photo et lui, c’est comme une personne et son ombre, jamais l’une sans l’autre.”

Jean Dimanche Kabré est le frère cadet de Paul Kabré. Pour lui, la photographie et son frère, c’est un amour de longue date. Il la vit, selon lui, comme une passion. “Grâce à sa passion, il est aujourd’hui la mémoire de notre famille de part l’immortalisation des évènement familiaux depuis les années 1960.

Paul Kabré est actuellement formateur en photographie

Du reste, en termes de valeurs et qualités humaines, il ressort dans tous les témoignages que Paul Kabré est d’une humanité inimitable. Il aime partager ce qu’il a et est toujours prêt à aider les autres. Ce que certains lui reconnaissent défaut apparent, c’est ne pas savoir demander de l’aide à quelqu’un peu importe les circonstances.

Paul Kabré et la photographie, c’est une histoire d’amour et de passion. Il l’a apprise, l’a adoptée, l’a pratiqué et en retour, elle le lui a rendu en lui ouvrant les portes du monde. Paul Kabré, ce nom à lui seul est un condensé de valeurs humaines mais aussi et surtout une marque déposée de la photographie mondiale. Un talent naturel et un art qui ne semblent pas être encore reconnus et appréciés à leur juste valeur au niveau national.  

Abdoulaye Tienon/Ouest Info

La rédaction
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Ouest Info est un média en ligne basé à Bobo-Dioulasso dans la région de l’Ouest du Burkina Faso.

2 Commentaires

  1. Et dire que c’est ce immense talent qui a failli perdre la vie chez moi (le ranch de Navigation est situé dans ma commune)! Mais son humilité, sa simplicité, son humeur avenante et sa gentillesse l’ont racheté. Que c’est Chouette! Et cet altruisme lui vaut d’être toujours le jeune homme qu’il paraît, à l’orée de ses 70 ans! Longue vie à toi, cher ainé. Dieu te bénisse davantage !

    • Oh merci mon beaucoup mon cher Idogo que j’appelle affectueusement le vigilant…
      Amen ! Que Dieu t’accorde une longue vie dans santé, bénéfice de la retraite que je souhaite paisible.

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