Agée de 13 ans, Sadia fera la classe de CM2 la rentrée scolaire prochaine. Mais elle doit compter sur son propre courage pour espérer faire partie des candidats à la session 2023 du Certificat d’Etude Primaire. L’un des plus dangereux dépotoirs d’ordures de Bobo-Dioulasso situé à Belle-Ville est son seul recours.
Sous un soleil accablant, Aminata Sadia Coulibaly, adolescente d’à peine 13 ans, fouille entre tessons de bouteilles, ferrailles rouillées, pointes et autres objets dangereux sans autre protection que des sandales aux pieds.
Elle se trouve sur le dépotoir de Belle-Ville mais pas pour le plaisir. Elle y cherche son avenir. D’une main habile, elle collecte, trie et catégorise sa récolte dans des sacs différents. Sachets, plastique solides, chaussures usées, morceaux de fer, quasiment pas grand-chose n’échappe à sa vigilance. Le soir tombé, elle fait peser sa moisson du jour, encaisse entre 1000 et 1500 FCFA avant de prendre la route de la maison. Et si elle s’amuse à rentrer tard, elle devra essuyer les réprimandes de ses parents.
Sadia côtoie ainsi des dangers de tout genre depuis le début de ses vacances pour essayer de construire son avenir. Avec un père sans emploi et une mère ménagère avec trois autres enfants à leur charge, Sadia n’a autre choix que de prendre son destin en main. Et ce n’est pas la première fois que cette poubelle à ciel ouvert, communément appelée « Le port de Belle-Ville », permet à l’adolescente de payer sa scolarité. Elle sillonne le dépotoir depuis sa classe de CE1.
L’année dernière, elle a pu économiser environ 25 000 FCFA. Avec cette somme, elle a pris en charge sa scolarité et s’est acheté ses fournitures et des vêtements. C’est l’expérience de vie de la petite Sadia.
Le recours au dépotoir n’a pas été son premier choix. “J’avais commencé à aller dans un atelier de couture mais là-bas, on ne peut pas avoir de l’argent. On se contente juste d’apprendre. Alors que je veux aller à l’école. C’est pourquoi depuis lors, je viens chercher ma scolarité ici. Je n’ai pas le choix, raison pour laquelle je viens fouiller la poubelle pendant les vacances. » nous confie-t-elle.
Sadia pense à son avenir scolaire après le Certificat d’étude primaire (CEP). La poubelle pourra-t-elle continuer à lui procurer les ressources nécessaires pour le collège? C’est la question qui taraude déjà l’esprit de l’adolescente habitée par la rage de réussir.
Obligée d’être adulte avant l’âge, Aminata Sadia Coulibaly est la figure de l’adolescente qui n’a pas le temps de faire sa crise. Face aux difficultés qui tentent d’hypothéquer son avenir scolaire, elle se montre résiliente, quitte à être scolarisée par le dangereux « port » ordurier de Belle-Ville.
Abdoulaye Tienon